dimanche 7 avril 2019

En attendant Pâques... (avec Yzus)

Pranzi è cenæ  (suite)

À quelques variantes près, l'ordonnance des repas offrait, après l'assortiment de charcuterie, les traditionnels œufs durs, les févettes à la croque-au-sel, les asperges sauvages à l'huile. Suivaient les croquettes à la béchamel, (la gloire de ma mère), le cabri de Benedettu, Ghjuvan Vitu ou l'agneau de lait de Salvatore U Rossu, servis avec pommes de terre fondantes, artichauts mijotés au vin blanc, piselli à la menthe, les fromages de Ghjulia Francesca et Celestina et, enfin, le dessert. Ah, les desserts… : sublime brocciu de Stefanu au sucre et à l'eau-de-vie, œufs à la neige, pastizzu de semoule fine au caramel, fiadone et, encore après, les premières fraises de Madame Perfetti quand Pâques tombait haut comme cette année, avec le café, canistrelli, panette, campanili bénits pendant la messe par Prete Flori.
Les vins, cépages corses, étaient produits par les cinq vignerons du hameau, rouge incarnat, capiteux, titrant facilement quatorze degrés ; Ange Pighini était seul à faire du blanc.


Comparons ces agapes au dîner simple et plaisant annoncé par Juvenal à son ami Persicus, dix-neuf siècles plus tôt, les similitudes sont étonnantes : "Écoute le menu : le marché n'en aura point fait les frais. Des pâturages de Tibur viendra un chevreau bien gras, le plus tendre du troupeau. Il n'aura pas encore brouté l'herbe ni osé mordre aux pousses des jeunes saules, il a plus de lait que de sang. Des asperges de montagne que, laissant là son fuseau, la fermière a cueillies, puis de gros œufs, encore tout chauds du foin fripé où ils étaient déposés, et les poules qui les ont pondus, des raisins conservés une partie de l'année, aussi beaux que sur les ceps, des poires de Signia, des pommes au frais parfum, rivales de celles du Picenium." [1]
(à suivre)

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