mardi 12 mai 2015

LE LIVRE DU MARDI

A l occasion de la célébration du centenaire du génocide arménien, j ai voulu lire ce premier roman de Valérie Toranian qu' on m'a chaudement recommandé et j' ai eu envie de vous le faire partager.
             
                   l' Etrangère
                Valerie Toranian
            Aux éditions Flammarion.

Ancienne directrice de ELLE , et aujourd'hui directrice de La Revue des deux mondes, V. Toranian a ressenti le besoin de rendre hommage à sa grand mère arménienne, cette " étrangère", rescapée des terribles massacres de 1915.
   Pendant longtemps, pourtant, Valérie a eu honte de cette grand mère, Aravni, trop grosse, trop brune et trop bouclée, si différente de la famille de sa mère, Françoise, tous blonds aux yeux bleus, avec des cheveux bien lisses.. Mais , en même temps qu'elle lui fait un peu honte, Valérie adore cette "Nani" qui parle à peine le français, mais avec laquelle elle aime regarder d'insipides feuilletons , gavée de ces merveilleux biscuits salés qu'elle confectionne pour sa petite fille.
  En grandissant, Valérie se familiarise avec la langue arménienne et, peu à peu, découvre, par bribes, l' histoire, terrible, de la jeune Aravni. C'est cette histoire qu'elle nous conte dans ce livre, alors qu'elle est enceinte de son premier enfant, et qu'elle décide de l'inscrire dans un destin, commencé, il y a longtemps..

   A Amassia, au sud de la mer noire,ce devrait être le temps des fêtes et des moissons, mais, en ce terrible été 1915, les arméniens, chrétiens et sujets de l'empire ottoman, revendiquent des droits et gênent le nouveau parti au pouvoir depuis 1908, les "jeunes-turcs". Alliés aux allemands en 1914, les turcs accusent les arméniens  d' être à la solde des russes et décident tout simplement de les faire disparaître.                     Aravni, dix sept ans,jeune fille choyée, récemment mariée est embarquée, avec sa mère, sa tante et son jeune frère, dans les premiers convois de la mort. 
   Le père et le mari d' Aravni ont été arrêtés et exécutés trois mois auparavant. Il ne reste que les femmes et les enfants. Commence alors un long chemin de croix, au cours duquel la faim et les maladies auront raison des plus faibles. Les femmes sont vendues , les bébés abandonnés faute de pouvoir les nourrir. Anna, la mère d' Aravni se laisse mourir de chagrin et Aravni se retrouve seule avec Méliné sa marraine et la petite Mariam. Arrivées à Alep, elles sont recueillies par un oncle généreux. Suivront l' exil en france, le remariage d' Aravni, la naissance de Avram, son fils adoré, père de Valérie...Et la vie, qui continue, sans que jamais ne s' efface le souvenir..
  Longtemps, Aravni a caché sous sa robe un talisman, le diplôme d' Agop, son premier mari, assassiné.Ce diplôme la rattachait à un milieu instruit, aisé. Quand les bourreaux voulaient lui enlever toute dignité, la transformer en bête pour qu'il n'y ait plus d'obstacle à son extermination, ce diplôme, garant de son humanité, lui permit de refuser d'être la bête qu'ils voulaient qu'elle devienne. 

Valérie Toranian nous fait partager l'urgence et la nécessité de la mémoire, et ce très beau livre prend une dimension
universelle. Je vous le conseille vivement.    M.A.V.

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