dimanche 6 novembre 2016

U VECCHJU RUTALI. Traditions orales.

Extrait du mémoire rédigé par le chanoine Jean-Thomas FLORI.

A tumbéra.

Avant ou après les fêtes de noël, on entendait à travers le village les cris des "majhali" (porcs) que l'on égorgeait. Dès qu'ils avaient rendu le dernier soupir, la soie ou les poils qui recouvraient leur corps étaient brulés à l'aide d'une plante "u croliulu". On versait ensuite sur le corps exsangue de l'animal de l'eau bouillante et, avec des couteaux (on se mettait à plusieurs), on le rasait à fond. Dès que la peau apparaissait blanche et lisse on le suspendait à une poutre ou potence. Pour ce faire, on procédait de la sorte : On lui attachait les pattes de derrière avec une grosse corde. Celle-ci était reliée à la potence À l'aide d'une grosse tige de bois "batulelu", la corde s'enroulait autour d'un bâton placé en travers des pieds de l'animal.
Grâce à cette opération, la corde entrainait automatiquement et sans effort le corps lourd du "majhale". On coinçait ensuite un deuxième bâton qui retenait ainsi, solidement amarrée, la corde à laquelle était suspendu le porc la tête en bas, la bouche était tenue largement  ouverte par un "steccu", mis en travers.
Le porc était ensuite éventré. On lui retirait les entrailles qui, une fois bien lavées dans la rivière di " a Iata", servaient à habiller "i salami, i lonzi, e salcicce" ainsi que "i sangui", car le sang aussi était utilisé. Les "sangui" étaient consommés les premiers car on ne pouvait pas les conserver longtemps. La vessie faisait la joie des enfants. Ils la gonflaient ou bien elle leur servait de ballon jusqu'à ce qu'elle éclate au bout de leur pied.
Le soir, le porc était ramené à terre. Il était étendu sur une planche.Il était alors partagé en deux parties égales. On le coupait de haut en bas en suivant l'épine dorsale. Le moment le plus attendu était la pesée. Les pronostics allaient alors "bon train". Des paris étaient pris concernant le poids des porc abattus dans l'année pour savoir celui qui pèserait le plus lourd et qui deviendrait ainsi "u capurale".
Le gros œuvre de dépeçage se pratiquait à la maison. Il était confié à des hommes experts en la matière. Ceux-ci se comptaient sur les doigts de la main. Leur travail consistait à mettre en forme les quatre jambons, à extraire intact le filet, à découper "a panza", à détacher l'entrecôte, à mettre, en un mot, de côté, tout ce qui servira à la fabrication des "salcicce, des ficatelli," qui étaient enfilés sur une "partigha" d'arbousier ou de châtaignier. Celle-ci était suspendue  dans la cuisine jusqu'à ce que la charcuterie soit fumée, tandis que les jambons, l'entrecôte, "e panzette" étaient placées dans "a salimoghja" d'où, ils n'étaient sortis que pour la consommation. Les jambons eux, étaient suspendus à des crochets fixés au plafond de la cave, ou, dans la fraîcheur ils retrouvaient leur saveur tant appréciée par les gourmets.
En effet, qu'elle était délicieuse cette charcuterie corse préparée par nos "mamme". Un ficatellu rôti au feu de bois avec "une pulendata" valait le meilleur de tous les repas !...
À suivre...

Croliulu = crògliulu : Genêt épineux.
Batulelu = battuléllu : Petit bâton.
Steccu : bout de bois.
Partigha = pàrtica ou pèrtica : perche, gaule.
Salimoghja = Salamòghja : saumure.

3 commentaires:

  1. Il faut reconnaître que la méthode de mise à mort était assez "sauvage" -dans l'indifférence générale. Heureusement, elle n'a plus cours depuis longtemps. Et personne ne le regrette.

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  2. Non, pas dans l'indifférence générale... J'étais sous le lit , les oreilles bouchées pour ne pas entendre les cris épouvantés de l'animal.

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  3. Moi même je partais en courant, dans la chambre et quand je n'entendais plus les cris J'arrivai pour aider les autres, car c'était beaucoup de boulot.

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