mardi 1 mai 2018

Et cette semaine ?


2 commentaires:

  1. Un peu de lyrisme et de burlesque avec des poèmes de Jean TARDIEU (1903-1995). Il faut entrer dans le jeu , je l'ai fait, Battine.

    Conversation

    Comment ça va sur la terre ?
    - Ça va, ça va bien.
    Les petits chiens sont-ils prospères ?
    - Mon dieu oui merci bien.
    Et les nuages ?
    - Ça flotte.
    Et les volcans ?
    - Ça mijote.
    Et les fleuves ?
    - Ça s’écoule.
    Et le temps ?
    - Ça se déroule.
    Et votre âme ?
    - Elle est malade
    Le printemps était trop vert
    Elle a mangé trop de salade.
    §§§
    Conseils donnés par une sorcière

    (À voix basse, avec un air épouvanté, à l’oreille du lecteur.)
    Retenez-vous de rire
    dans le petit matin !
    N’écoutez pas les arbres
    qui gardent les chemins !
    Ne dites votre nom
    à la terre endormie
    qu’après minuit sonné !
    A la neige, à la pluie
    ne tendez pas la main !
    N’ouvrez votre fenêtre
    qu’aux petites planètes
    que vous connaissez bien !
    Confidence pour confidence :
    Vous qui venez me consulter,
    méfiance, méfiance !
    On ne sait pas ce qui peut arriver.
    §§§

    La môme néant

    (Voix de marionnette, voix de fausset, aiguë,
    nasillarde, cassée, cassante, caquetante, édentée.)


    Quoi qu'a dit ?
    - A dit rin.

    Quoi qu'a fait ?
    - A fait rin.

    A quoi qu'a pense ?
    - A pense à rin.

    Pourquoi qu'a dit rin ?
    Pourquoi qu'a fait rin ?
    Pourquoi qu'a pense à rin ?

    - A' xiste pas.

    §§§

    Les erreurs
    (la première voix est ténorisante, maniérée, prétentieuse ;
    l’autre est rauque, cynique et dure.)

    Je suis ravi de vous voir bel enfant vêtu de noir.
    – Je ne suis pas un enfant je suis un gros éléphant.
    Quelle est cette femme exquise qui savoure les cerises ?
    – C’est un marchand de charbon qui s’achète du savon.
    Ah ! Que j’aime entendre à l’aube roucouler cette colombe !
    – C’est un ivrogne qui boit dans sa chambre sous le toit.
    Mets ta main dans ma main tendre je t’aime ô ma fiancée !
    §§§

    Monsieur interroge Monsieur

    Monsieur pardonnez-moi
    de vous importuner
    quel bizarre chapeau
    vous avez sur la tête !

    -Monsieur vous vous trompez
    car je n'ai plus de tête
    comment voulez-vous donc
    que je porte un chapeau !

    -Et quel est cet habit
    dont vous êtes vêtu ?

    -Monsieur je le regrette
    mais je n'ai plus de corps
    et n'ayant plus de corps
    je ne mets plus d'habit

    -Pourtant lorsque je parle
    Monsieur vous répondez
    et cela m'encourage
    à vous interroger :
    Monsieur quels sont ces gens
    que je vois rassemblés
    et qui semble attendre
    avant de s'avancer ?

    -Monsieur ce sont des arbres
    dans une plaine immense
    Ils ne peuvent bouger
    car ils sont attachés

    Monsieur Monsieur Monsieur
    au-dessus de nos têtes
    Quels sont ces yeux nombreux
    qui dans la nuit regardent ?

    -Monsieur ce sont des astres
    Ils tournent sur eux-même
    et ne regarde rien

    -Monsieur quels sont ces cris
    quelque part on dirait
    on dirait que l'on rit
    on dirait que l'on pleure
    on dirait que l'on souffre ?

    -Monsieur ce sont les dents
    les dents de l'océan
    qui mordent les rochers
    sans avoir soif ni faim
    et sans férocité

    -Monsieur quels sont ces actes
    ces mouvements de feux
    ces déplacements d'air
    ces déplacements d'astres
    roulements de tambour
    roulements de tonnerre
    on dirait des armées
    qui partent pour la guerre
    sans avoir d'ennemi ?

    -Monsieur c'est la matière
    qui s'enfante elle-même
    et se fait des enfants
    pour se faire la guerre

    -Monsieur soudain ceci
    soudain ceci m'étonne
    Il n'y a plus personne
    pourtant moi je vous parle
    et vous vous m'entendez
    puisque vous répondez !

    -Monsieur ce sont les choses
    qui ne voient ni entendent
    mais qui voudraient entendre
    et qui voudraient parler

    -Monsieur à travers tout
    quelles sont ces images
    tantôt en liberté
    et tantôt enfermées
    Cette énorme pensée
    Où des figure passent
    Où brillent des couleurs ?

    -Monsieur c'était l'espace
    et l'espace
    se meurt


    Tardieu Jean


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  2. La sonate Au Clair de Lune de Beethoven. Merci

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