vendredi 1 juin 2018

MUSÉE du "carédar"... [MANET-Grand canal de Venise_]

Édouard MANET
"Grand canal de Venise"_1875
Huile sur toile. (208 cm X 264,5 cm)
Musée de Shelburne, Vermont, USA.
"carédar-297"
Certains tableaux d’Édouard Manet sont tellement entrés dans notre univers pictural quotidien et nos souvenirs qu’on a du mal à imaginer à quel point Manet était révolutionnaire à son époque. Le Déjeuner sur l’herbe (1863), Olympia (1863), ou encore Le Fifre (1866) sont devenus des icônes et ne nous étonnent même plus. Un peu avant 1870, Manet rencontre Monet. Il va travailler chez celui qui est devenu son ami en 1873 à Argenteuil. Il abandonne son "jus de pruneau" qu’il a hérité de Velázquez et Goya. Il se met à la peinture de plein-air et à des bleus puissants, qui viennent remplacer les bruns et les noirs de jadis. Au passage, Manet critique Renoir. Ce dernier l’a raconté dans la biographie de Renoir par Vollard. "Quand je fus parti, Manet s’adressant à Claude Monet : “ Vous qui êtes l’ami de Renoir, vous devriez lui conseiller de renoncer à la peinture ! Vous voyez vous-même comme c’est peu son affaire !”. Après En Bateau et Argenteuil en 1874, « étant allé en 1875 faire un voyage à Venise, il en rapporta deux toiles de plein air. Le motif lui avait été fourni par les poteaux de couleurs vives, placés sur les canaux, devant la porte d’eau de certains palais. » raconte Théodore Duret. Malheureusement pour nous, visiteurs des musées de France, les deux toiles vénitiennes sont aux États-Unis, l’une dans le Vermont, l’autre à San Francisco. Mais quelle évolution !
En 1875, l’impressionnisme n’est né que depuis un an. Et pourtant, le traitement de l’eau au premier plan et celui des façades de l’arrière-plan sont révolutionnaires. La lumière, mais aussi les harmonies de couleurs, les contrastes, avec la tache noire de la gondole au centre, les touches qui annoncent le néo-impressionnisme qui naîtra 10 ans plus tard, après la mort de Manet.

Éloge à Édouard MANET (1832 - 1883) : "Manet n'apporte pas un idéal nouveau, une manière nouvelle de penser ou de sentir la nature ; il apporte une manière nouvelle de la regarder et de la voir. La révolution qu'il opère est une révolution technique qui a son point de départ dans l'originalité de sa vision. Il est, avant tout, un œil merveilleusement sensible. Les peintres avaient habitué le public à une certaine transposition de la couleur et de la lumière dans les tableaux ; cette transposition était tenue, d'un commun accord, pour la condition même du langage artistique, de sa délicatesse et de ses harmonies : Manet n'acceptait pas cette prétendue vision artistique, il apportait des sensations nouvelles et entre ces sensations des rapports nouveaux." _ (Gabriel Séailles)

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