dimanche 26 juin 2022

Raymond Devos : "On en parle ?"

Mesdames et messieurs... je vous signale tout de suite que je vais parler pour ne rien dire.

Oh ! je sais ! Vous pensez : "S’il n’a rien à dire... il ferait mieux de se taire !"

Évidemment ! Mais c’est trop facile ! ... C’est trop facile ! Vous voudriez que je fasse comme tous ceux qui n’ont rien à dire et qui le gardent pour eux ?

Eh bien, non !

Mesdames et Messieurs, moi, lorsque je n’ai rien à dire, je veux qu’on le sache !

Je veux en faire profiter les autres !

Et si, vous-mêmes, Mesdames et Messieurs, vous n’avez rien à dire,

Eh bien, on en parle, on en discute !

Je ne suis pas ennemi du colloque.

Mais, me direz-vous, si on en parle pour ne rien dire, de quoi allons-nous parler ?

Eh bien, de rien ! De rien !

Car rien ... ce n’est pas rien !

La preuve c’est qu’on peut le soustraire.

Exemple :

Rien moins rien = moins que rien !

Si l’on peut trouver moins que rien c’est que rien vaut déjà quelque chose !

On peut acheter quelque chose avec rien !

En le multipliant :

Un fois rien ... c’est rien.

Deux fois rien ... ce n’est pas beaucoup !

Mais trois fois rien ! ... Pour trois fois rien, on peut déjà acheter quelque chose ... et pour pas cher !

Maintenant, si vous multipliez trois fois rien par trois fois rien :

Rien multiplié par rien = rien.

Trois multiplié par trois = neuf.

Cela fait rien de neuf !

Oui ... Ce n’est pas la peine d’en parler !

Bon ! Parlons d’autres choses !

Parlons de la situation, tenez !

Sans préciser laquelle !

Si vous le permettez, je vais faire brièvement l’historique de la situation, quelle qu’elle soit !

Il y a quelques mois, souvenez-vous : la situation pour n’être pas pire que celle d’aujourd’hui n’en était pas meilleure non plus !

Déjà, nous allions vers la catastrophe et nous le savions ...

Nous en étions conscients !

Car il ne faudrait pas croire que les responsables d’hier étaient plus ignorants de la situation que ne le sont ceux d’aujourd’hui !

Oui ! La catastrophe, nous le pensions, était pour demain !

C’est-à-dire qu’en fait elle devait être pour aujourd’hui !

Si mes calculs sont justes !

Or, que voyons-nous aujourd’hui ?

Qu’elle est toujours pour demain !

Alors, je vous pose la question, Mesdames et Messieurs :

Est-ce en remettant toujours au lendemain la catastrophe que nous pourrions faire le jour même que nous l’éviterons ?

D’ailleurs, je vous signale entre parenthèses, que si le gouvernement actuel n’est pas capable d’assurer la catastrophe, il est possible que l’opposition s’en empare !

Raymond Devos

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