mercredi 2 novembre 2022

À la demande... [Léo Ferré - La servante au grand coeur (Charles Baudelaire)]


La Servante au grand cœur

La servante au grand cœur dont vous étiez jalouse
Et qui dort son sommeil sous une humble pelouse
Nous devrions pourtant lui porter quelques fleurs
Les morts, les pauvres morts, ont de grandes douleurs
Et quand octobre souffle, émondeur des vieux arbres
Son vent mélancolique alentour de leurs marbres

Certes, ils doivent trouver les vivants bien ingrats
À dormir, comme ils font, chaudement dans leurs draps
Tandis que, dévorés de noires songeries
Sans compagnon de lit, sans bonnes causeries
Vieux squelettes gelés travaillés par le ver
Ils sentent s'égoutter les neiges de l'hiver

Et le siècle couler, sans qu'amis ni famille
Remplacent les lambeaux qui pendent à leur grille

Lorsque la bûche siffle et chante
Si le soir, calme, dans le fauteuil, je la voyais s'asseoir
Si, par une nuit bleue et froide de décembre
Je la trouvais tapie en un coin de ma chambre
Grave, et venant du fond de son lit éternel
Couver l'enfant grandi de son œil maternel

Que pourrais-je répondre à cette âme pieuse
Voyant tomber des pleurs de sa paupière creuse ?

Charles Baudelaire

1 commentaire:

  1. Je ne connaissais pas la version chantée par Léo Ferré . ..

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