vendredi 23 mai 2014

QUE FAIRE DE LA SNCM ?

Apres des décennies de navigation à vue, de désinvolture à l'égard de la clientèle, d'absence de courage des directions successives et des politiques, d'irresponsabilité syndicale suicidaire, de choix d'investissements discutables, de gestion laxiste, de pillage organisé, de manipulations financières... La compagnie historique qui assure le service public maritime corse-continent est une fois de plus au bord du naufrage. 
Pourra-t-elle être sauvée ? 
Et à quel prix pour le contribuable ? 
Mérite-t-elle d'ailleurs d'être sauvée telle quelle ?  

Vous, qu'en pensez-vous ?

La contribution de Nicolas Vellutini:

Quelques éléments de réflexion à propos de la SNCM (et comme je ne parviens pas à publier mes commentaires,je te les adresse directement).
Une correction tout d'abord : le Napoléon Bonaparte n'est (ou n'était) pas le navire le plus récent.Le navire le plus récent de la flotte est le Pascal Paoli (2003)
Cette simple correction vient mettre l'accent sur un des problèmes majeurs de la Compagnie : des navires anciens, obsolètes, couteux tant en équipages qu'en combustible, mal adaptés à la clientèle et à la desserte. Ce qui permet de s'interroger sur les décisions prises tant par l'Etat,actionnaire principal jusqu'en 2005, que par la Compagnie elle-même. Ainsi le choix de construire le Napoléon Bonaparte ne répondait certainement pas au désir de mieux assurer la desserte de la Corse,mais à une stratégie tendant à s'inscrire dans un développement des croisières en Méditerrannée, quant à sa construction sur un chantier naval français; celle-ci (dont le cout est estimé à 1/3 du cout total du navire) relevant d'une décision de l'Etat était destinée à soutenir le chantier naval lui-même. Même chose,à la même époque
avec les NGV, de conception quasi révolutionnaire (coque en aluminium,turbine au gaz), mais dont ni la capacité ni les conditions de navigation ni l'utilisation ne pouvaient correspondre à une desserte de la Corse. Tout celà se passe de 1995 à 1998. Peu de temps auparavant a été mise en place une réforme de la manutention sur les ports (1992), entrainant au regard du statut des dockers de nombreuses grèves, longues, dures, qui ont laissé des traces, notamment sur le port de Marseille.
Or Marseille,c'est justement le port de la SNCM qui a été fortement touchée par ces grèves qui ont bloqué tout trafic parfois durant des semaines. Parallèlement,en 1996 les directives Européennes permettent le cabotage. Après un bref essai sous pavillon français la Corsica Ferries intervient sur les lignes nationales constituant, avec une flotte plus importante, des navires mieux adaptés et des équipages relevant d'un autre régime social que ceux de la SNCM, une concurrence importante (avec
aussi des méthodes de gestion low coast, inconnues à la SNCM). Pendant cette même période apparaissent sur le port de Marseille d'autres Compagnies assurant la desserte du Maghreb et qui constituent aussi une concurrence redoutable.
Ainsi, attaquée sur tous les fronts par la concurrence, répondant souvent à ces attaques par des choix inadaptés,avec des couts extrêmement élevés et un actionnaire principal dont le métier n'est certainement pas la gestion de lignes maritimes, la Compagnie se trouve dans une situation particulièrement délicate lorsqu'est imaginée la solution consistant à privatiser la Société.
Après des péripéties que tout le monde connait (appel d'offres remporté par un fonds de pensions:Butler - appel à Véolia, rachat de Véolia auprès de Butler)la SNCM se retrouve avec un capital pour le moins curieusement composé : Véolia est majoritairement représenté (66%),mais l'Etat continue à détenir 25%,tandis que les salariés de la compagnie obtiennent 9%.
Il faut préçiser que ces opérations ont duré pratiquement 2 ans avant d'aboutir à cette composition du capital. Pendant cette période,dont on a vu combien elle étaitdifficile pour la compagnie à l'extérieur, les grèves et arrets de travail des salariés SNCM se sont multipliés au regard de l'inquiétude sur le sort réservé à la compagnie.
Parallèlement ,notamment en 2000 et 2002, les dispositions législatives et règlementaires pour la Corse sont profondément modifiées.Elles tendent à affirmer la capacité de gestion de l'ile sur les problèmes qui lui sont propres  et la desserte maritime est sans doute le principal.
Au sein de la Compagnie,la concurrence syndicale (CGT/STC)bat son plein,s'appuyant sur l'inquiétude des salariés et multipliant autant les arrêts de travail que la désorganisation de la Compagnie.
Période délicate au plan de la concurrence, nécessité d'adapter la flotte autant que les méthodes de gestion, difficultés financières, guerre des syndicats, désorganisation, manque de financement........c'est la situation trouvée par Véolia, réputé excellent gestionnaire au moment de son entrée dans la SNCM.
Malgré cette situation la SNCM obtient en 2007 la Délégation de Service Public pour assurer la desserte de la Corse.Cette DSP constitue pour la Compagnie une recette de base, essentielle à la poursuite de ses activités. Pourtant la subvention qui représente plus de 100 millions d'euros est contestée :pour la définition du cahier des charges qui la compose (desserte de tous les ports insulaires à partir de Marseille), pour la période dite "complémentaire", correspondant à la mise en ligne
d'un nombre de places supplémentaire durant l'été.Mais la Compagnie, malgré de nouvelles méthodes de gestion, malgré des économies réalisées,notamment par le biais de restructurations reste toujours déficitaire et en fin 2011 son président propose de la vendre à la Collectivité Territoriale de Corse pour 1 euro symbolique.Il n'oublie cependant pas de rappeler, par un courrier complémentaire que cette vente devra entrainer le remboursement à Véolia des sommes engagées pour assurer
l'équilibre au cours des années précédentes, soit environ 150 millions d'euros.
Depuis sont apparues comme de plus en plus réclamées les demandes de remboursement de Bruxelles, les sommes qui seraient dues à l'Office des transports, et la notion avancée de Société d'Economie Mixte basée sur plusieurs éléments : d'abord la situation financière, qui entre les sommes dues et les déficits chroniques ne permet plus une poursuite sereine de l'activité : son appréciation serait laissée au Tribunal de Commerce, la volonté de l'actionnaire principal (Véolia/Transdev) ne ne plus poursuivre le 
cumul des déficits : là aussi le Tribunal devra trancher, la décision du Tribunal qui ne semble faire de doute pour personne,entrainerait une liquidation de la SNCM,et vraisemblablement la vente de ses actifs composés pour l'essentiel par les navires, dans ce cadre,la CTC se proposerait comme acquéreur,faisant valoir tant la créance détenue sur la SNCM,que la necessité de la desserte de la corse,que les sommes payées dans ce cadre au titre de la subvention de continuité territoriale
enfin,une nouvelle structure pourrait accueillir la flotte et la gestion de la desserte
sous forme de Société d'Economie Mixte.
On ne peut cependant éluder les nombreux problèmes que cela pose : 
-composition de la SEM ?
- composition de la flotte ? - couts et configurations futurs de la desserte ?
- capacité à court terme de renouvellement de la flotte
- sort des salariés ?
Le tout en soulignant que les études réalisées sur la SEM ne prennent en compte que les cargos mixtes existants,soit 4 navires (Pascal Paoli, Monte Rotondo, Paglia Orba, Jean Nicoli) avec une desserte assurée conjointement avec la Méridionale (3 navires)?

Alors quelle sera la suite ? La CTC peut elle supporter les couts de la desserte,celle-ci doit elle toucher tous les ports comme aujourd'hui,avec la même fréquence, avec quels tarifs, quelle concurrence et sur quel port continental ?Les mêmes questions (et bien d'autres ) révèlent des problèmes quant à l'organisation des transports routiers, de la manutention, de la structuration de la (future?) SEM........de son financement et de sa capacité d'équilibre....
La conclusion est que nous sommes sans doute à l'aube d'un nouveau type de liaison maritime Corse - continent et avec la disparition désormais quasi-inéluctable de l'opérateur historique, face à une situation qui n'a jamais été connue au cours des soixante dernières années....
Loin de la seule concurrence Jaunes / Bleus, c'est toute la desserte qu'il convient de réinventer.......

U cuccu: J'ai placé la longue et intéressante contribution de Nicolas (bien placé pour cela...) dans le Post lui-même car elle apporte une matière essentielle à la compréhension de la situation et à la formation de votre propre opinion.

15 commentaires:

  1. Le plus grand responsable du naufrage de la SNCM ? la CGT avec toutes ses grèves à répétition, qui à la longue ont fait peur aux passagers qui ne voulaient pas être pris en otage au moment d'embarquer et passer 24 à 48 H sur le quai. Dommage ! ! ! pour ma part je me refuse de prendre Corsica Ferries ; je n'ai pas envie de dormir dans une cabine où un chien aura peut être dormi sur le lit et fais ses besoins sur la moquette ! ! !

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  2. Qui est le grand responsable de la faillite de la SNCM ? La CGT ..... avec toutes ses grèves à répétition ! ! Grèves qui ont affolé les usagers qui ne voulaient plus être pris en otage au moment de l'embarquement .... 24 à 48 H bloqués sur les quais ! ! ! Conséquences ? développement de la Corsica Ferries ...... Pour ma part je me refuse à prendre cette Compagnie. Je n'ai pas envie de dormir dans une cabine où un chien aura peut-être dormi sur la couchette, sans parler de ses besoins qu'il aura fait sur la moquette (véridique) et quand vous êtes au restaurant et que vous avez un chien qui vomi à côté de vous ! ! !

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  3. Bon Cuccu, vous êtes sévère avec la SNCM. Mais ce sera mieux si on se retrouve avec seulement les Jaunes?

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  4. La SNCM s'est sabotée elle-même avec l'aide de CGT .Depuis les grèves de 1968 ,ils n'ont pas arrêté leurs arrê^ts de travail, ce qui a permis "a la compagnie jaune" d'établir de plus en plus de liaisons. Et les Cégétistes de la SNCM se sont laissé manipuler sans ouvrir les yeux et comprendre qu'ils se sabordaient. Si ça pouvait servir d'exemple dans d'autres cas identiques ce serait un moindre mal. Forza la Corse!

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  5. Bravo U CUCCU qui nous expose des évidences que personne n'a voulu voir .Le" lascia corre" a été roi à la SNCM.Ils sont en train d'en payer les pots cassés.A méditer.....

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  6. Et toutes les familles qui gravitent et qui vivent autour de cette compagnie vous y pensez

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    1. Bien sur que tout le monde y pense mais la CGT elle y a pensé ...............

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    2. Bien sur tout le monde y pense mais c'étaient surtout aux employés de la SNCM de réfléchir aux conséquences de leurs multiples grêves ;des familles entières à attendre leur bon vouloir pour pouvoir embarquer, souvent à cours d'argent pour aller à l'hôtel, soucieux d"avoir à reprendre leur travail pour certains. La SNCM a traité ses passagers avec beaucoup de désinvolture et également les habitants de la Corse en 1968 qui n'étaient plus ravitaillés. La compagnie "jaune" a été astucieuse, elle a créé des rotations avec des moyens limités mais qui ont dépanné la Corse qui a été ravitaillée avec des produits Italiens , le commerce s'est développé aux détriments de la Métropole. C'était dans l'air du temps, les grêves en 1968 mais par la suite la SNCM y a pris gout et la concurrence s'est développée. Il ne leur reste qu'à faire leur Mea Culpa. Le LIBRE ARBITRE ça existe. Il suffit de ne pas se faire manipuler.

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  7. Le souci du personnel est dans tous les esprits mais il faut bien se rendre compte que les déficits ne seront plus combles par personne.

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  8. Mais le personnel etait-il conscient que par ses comportements il creusait sa propre tombe? Ou trouvait-il normal que des bars de la Joliette fonctionnent sur les stockd d'alcools de la SNCM ? Que l'on vende regulierement sous le manteau des gigots d'agneau et zutres dutgeles issud tout droit des chambred froides des navires du cote de la Porte d' Aix...?

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  9. Pas tout à fait d’accord avec l’analyse de NV : le problème majeur de la SNCM n’était pas l’obsolescence des navires mais l’obscénité du jusqu’au-boutisme syndical qui, à coup de « grèves-prises-de passagers en otages » a obtenu un statut hors norme pour les personnels avec un temps de travail inférieur à 100 jours par an (notamment en « récupérant » 3 jours de repos pour un jour à la mer), pour de confortables rémunérations, améliorées pour certains par le « coulage » des marchandises du bord comme le rappelle un intervenant. On ne peut que reprendre, en remplaçant « déclin » par « naufrage » et « port » par « compagnie » les conclusions du rapport de la Cour des Comptes (2011) sur le port de Marseille, avec le même accusé à la barre :
    « L’un des facteurs essentiels, sinon le principal, de ce déclin tient à la fiabilité insuffisante du port, due à un climat social dégradé, avec une alternance de périodes de calme et de crises, souvent violentes, dans un contexte où un syndicat domine tous les autres. Même dans les moments où le port est actif, les « fondamentaux » issus de précédents accords, explicites ou tacites, ne sont jamais réexaminés, ce qui freine le mouvement de réforme et d’adaptation à la concurrence. Portée par la direction du port et encouragée, voire stimulée, en temps normal, par les tutelles ministérielles, la volonté de réforme se délite trop souvent, notamment faute d’une détermination suffisante des autorités de l’État face à la crise sociale et l’extrême tension qui l’accompagne. Il manque au port de Marseille que s’y applique l’état de droit normal, où chacun tient son rôle dans le dialogue économique et social, mais où les limites du débat démocratique ne sont pas franchies. Il appartient à chaque acteur de l’appliquer ou de le faire appliquer, en veillant au respect de la loi et à la mise en œuvre des sanctions nécessaires, en particulier lorsque des actes de violence sont commis ».
    Qui voudrait, dans ces conditions reprendre ce boulet ?

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  10. La CGT n'a pas seulement coulé la SNCM elle a tsunamisé le port de Marseille ...mais rendons leur grâce ...le port ,les silos,les magasins généraux ,les aires de stockage,etc sont devenus des lieux culturels unique au monde.....bc

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  11. Ces pratiques de "coulage" de la marchandise étaient courantes, répétées, je crois qu'ils avaient fini par penser que le pillage de leur entreprise faisait partie des "avantages acquis". Mais le comble semble avoir été atteint lorsqu'à la suite de je ne sais quel deal ou quel fait accompli, les recettes des bars des navires ont été partagées une semaine pour la compagnie, une semaine pour le syndicat !!! (Sic)
    Où a-t-on jamais vu cela, quels dirigeants d'entreprise dignes de ce nom ont pu accepter de telle pratiques qui relèvent plus des façons des syndicats américains des année trente, que d'une action syndicale classique. Et en fin d'année, le responsable syndical distribuerait des primes en liquide au personnel, sur des critères connus de lui ...(Témoignage)

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  12. Oui la cgt est largement responsable de cette situation, pas seule mais largement. Mais au point ou en est cette compagnie, que peut-on faire. Cela fait beaucoup de chômeurs potentiels.

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  13. Il faut bien essayer de conclure... On comprend que dans le contexte actuel, le gouvernement essaye de retarder l'échéance, mais ceux qui auront tué la compagnie ne seront pas ceux qui signeront l'acte de décès. Avec une situation économique en déclin ( perte de parts de marche) une situation sociale on ne peut plus dégradée, une situation financière catastrophique ( pertes et amendes impossibles à couvrir), il ne reste hélas qu'une issue: la liquidation judiciaire.
    Un autre exploitant pourra être créé , avec ou sans les collectivités territoriales, mais surtout avec un véritable opérateur industriel. Il reprendrait les cargos-mixtes en associant la CMN, seuls adaptes à la mission de service public et seuls bénéficiaires, à l'avenir, de la subvention de continuité territoriale. Les cars-ferries étaient évidemment préférés par la CGT et la direction, car ils embauchaient plus de monde, mais on ne pourra plus subventionner ces gros navires qui naviguent souvent quasiment à vide ou qui hibernent une bonne partie de l'année. Ils étaient conçus pour transporter des touristes, mais ce transport la n'a rien à voir avec le service public qui a été conçu pour les Corses. S'il y a un marche l'été, la libre occurrence ne manquera pas de s'en charger.
    Il ne faudra pas imposer à cette nouvelle compagnie des obligations économiquement ruineuses comme la desserte des ports secondaires. Bastia et Ajaccio sont suffisants, faisons plutôt de bonnes routes entre...
    Nous arrivons au plus dur.
    Une telle desserte ne nécessiterait que l'emploi de 600 personnes, la casse sociale serait énorme , plus d'un millier de postes supprimes, par rapport aux sur-effectifs actuels ! L'Etat sera fortement sollicité pour participer au financement du plan social, ce ne sera que justice son laxisme passe à un coût qu'il faut bien solder un jour. Marseille et la Corse seront en ébullition...
    Celui qui signera l'acte de décès ne s'en relèvera politiquement pas, mais y- a-t'il une autre fin possible ?

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