L'oncle
Gastounet, malgré son grand âge, ne renonçait pas à la partie de
chasse du dimanche et surtout au casse-croûte de midi avec ses
amis : Jean-Jean apportait le jambon parfumé, Paul son fromage de
chèvre et Matteu n'oubliait jamais la gourde de rosé ! Il était
14h et l'oncle avait repris son poste assis sur un rocher plat au
milieu du champ ; la tête appuyée sur son fusil, il dormait. Un
faisan picorait à ses pieds.
– Je
ne sais pas... on a floodé, peut-être, ou dit une connerie sur un
auteur, ou bien un auteur a râlé sur une correction, qu'est ce que
j'en sais... dans ce groupe, il y a quelques grands malades, à
commencer par...
– Oh !
Gaston, réveille-toi ! Qu'est-ce que tu racontes? De quoi parles-tu
? De qui ? Il y a un malade dans le groupe ? Mais, réveille-toi donc
! La chasse est finie, le sanglier ne viendra plus aujourd'hui.
À
grand peine, Jean-Jean mit le vieil homme debout. Les yeux hagards,
il regardait ses amis sans les reconnaître. Un peu de sang coulait
de son oreille gauche...
–
Qui est cet homme qui me parle ?
Chasse, sanglier... que me veut-il ? Pourquoi suis-je si fatigué ?
En regagnant la voiture avec l'Autre, il se vit dans le rétroviseur
: ce n'était plus sa tête et il eut peur de la voix qui sortit de
sa bouche lorsqu'il poussa un cri d'épouvante... Cette brutale et
inexplicable hallucination s'aggrava lorsque Gaston se rendit compte
qu'en plus de son physique, sa vie également n'était plus tout à
fait la même, dans cet univers parallèle... Mais que pouvait-il
faire pour réintégrer sa réalité rassurante ?
À
peine le 4x4 arrêté sur la place, nous nous précipitâmes vers
l'oncle.Tante Amélie, les larmes aux yeux, s'approcha pour l'aider.
L'oncle la repoussa ; il titubait, les bras en avant, en marmonnant
: "Traditori, traditori, assassini".
On
appela Joseph, le médecin qui passait son Week-end au village.
Devant une tension élevée et cette oreille gauche qui saignait
encore, il conseilla d'emmener l'oncle en urgence à l'hôpital .
Au
vu des symptômes, le jeune médecin souhaita que Gaston reste en
"observation". Il était troublé par l'inquiétante
étrangeté des symptômes de son patient : des mots égrenés sans
cesse "traditori, assassini", une oreille qui saignait et
une perte d'identité...
Gaston arrêta de crier. Il avait conscience que ses cris effrayaient ces gens, ceux en blanc et les autres... Où étaient les siens ? L'enfer c'est les autres. Ce huit-clos dont est extraite cette phrase, il le vivait aujourd'hui lui qui n'était plus être avec les autres...
Gaston arrêta de crier. Il avait conscience que ses cris effrayaient ces gens, ceux en blanc et les autres... Où étaient les siens ? L'enfer c'est les autres. Ce huit-clos dont est extraite cette phrase, il le vivait aujourd'hui lui qui n'était plus être avec les autres...
Penchés
au-dessus du lit, nous essayions de saisir les mots hachés que
l'oncle prononçait : "fu cili, sul..lati, ohimè ohimè !
non, ne me tuez pas !"
Tante
Amélie murmura : "Je crois qu'il se retrouve en Algérie où
nous avons vécu, il y a plus de 50 ans, des jours affreux".
– Excusez- moi, dit l'infirmière j'emmène le malade à la salle d'examen où l'oto-rhino vient d'arriver.
– Excusez- moi, dit l'infirmière j'emmène le malade à la salle d'examen où l'oto-rhino vient d'arriver.
– Où
suis-je ? Encore une blouse blanche. Je suis là. J’ignore depuis
combien de temps, cela fait plusieurs années que j’ai cessé de
compter les jours passés à fouler ce monde froid, s’il est
possible de parler de jours sur cette planète où le temps ne
semble pas avoir cours. J'ai quitté ma planète il y a bien
longtemps. Chacune des planètes que j’ai traversées était
différente ; les matériaux variaient. Certaines étaient
recouvertes de sable, d’autres de roches, d’autres encore
n’étaient que vallées herbeuses s’étendant à perte de vue.
Le relief également était toujours différent, certaines de ces
planètes étaient parfaitement sphériques alors que d’autres
n’étaient que crevasses et montagnes. Mais, malgré toutes ces
différences, tous les mondes que j’ai traversés étaient
fondamentalement les mêmes : des déserts humains s’étendant à
l’infini sous un ciel uniformément noir gouverné seulement par
une Lune moqueuse. Chacun était plus froid que le précédent, plus
venteux également... Mais il me
semble que je serai bien ici. Une douce chaleur m'envahit, j'entends
des voix familières. Existerait-il donc un monde harmonieux ?
–
Madame, je vous ramène votre mari, ne
vous inquiétez pas le docteur va passer, d'ailleurs le voici.
–
Eh bien, il en raconte des histoires
ce monsieur ! Il n'a pas cessé de parler durant
l'intervention, dit le médecin, il s'intéresse beaucoup à
l'univers, me semble-t-il. En
fait, j'ai trouvé une tique qui s'était enfoncée profondément
dans son oreille ; je l'ai extraite et tout devrait rentrer dans
l'ordre. Nous gardons notre "astronaute" jusqu'à demain.
Gaston
fut bien content de se débarrasser de cette tique hallucinogène
qui avait modifié sa réalité. Ce soir, au village, il pourrait
renouer avec le plaisir de partager la compagnie de ses semblables…
Bonjour,
RépondreSupprimerA la lecture de l'histoire, il me semble qu'il manque un petit bout de l'histoire au début avant le "oh Gaston" ..
J'en profite pour vous remercier pour cette amusante initiative
Voilà, oubli réparé...
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