Puis
il y a eu le cyclone, le départ précipité des hommes, l’absence
de nouvelles, et l’annonce sidérante de la disparition du
régiment, pratiquement décimé. Quand Maria a commencé à sortir
de sa prostration, Aimée avait disparu. Elle n’est plus réapparue,
et Maria a su un jour qu’elle avait fait sa vie de l’autre côté
des monts…
Comme
d’habitude, elle fera un petit crochet pour passer au monument aux
morts. Il est petit et très simple dans sa nudité de granit gris.
Mais une longue liste l’habille de haut en bas. Elle effleure du
regard leurs trois noms, le père et les deux fils, disparus dans la
même tourmente. Il y a longtemps que Maria n’a plus de larmes ;
elle souffre toujours, mais elle s’est habituée à sa souffrance ;
c’est comme un animal familier qui lui ronge sourdement le cœur.
Mais
déjà la fraîcheur de la fontaine se fait sentir. Puis le chant de
l’eau se fait entendre, enfin le jet d’un blanc éblouissant
apparaît, dans un écrin de verdure foisonnante. Cette fontaine fait
la fierté du village ! De larges marches de belles pierres
forment un véritable perron. On monte lentement cet escalier
majestueux, tandis que l’eau fait maintenant un bruit de plus en
plus assourdissant. Maria, rituellement, tend sa main comme une coupe
et boit quelques gorgées ainsi recueillies. Elle est désaltérée,
et éclaboussée de milles gouttelettes qui la réjouissent…Elle
repart avec sa bouteille déjà recouverte, dernière magie, d’une
impalpable buée…
Il
ne faut pas perdre de temps, puisque dès cet après-midi les deux
amies vont emmener Luisetta au torrent, rejoignant ainsi d’autres
enfants du village. (à suivre)
¤ ¤ ¤ ¤ ¤ ¤ ¤
Cette histoire,si bien racontée peut toucher plus d'une personne au village.
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