samedi 26 novembre 2016

Lettre ouverte au Père Noël... (envoi de Lydia)

Cher Père Noël !

Tout d'abord, permettez-moi le vouvoiement : je préfère le "vous", signe pour moi, de respect, car vous n'êtes pas un copain ni un semblable ; vous vous situez ailleurs, plus haut. C'est ce que j'aime en vous. J'ai longtemps hésité à vous écrire : tant de gens ne croient plus en votre existence ; si on les laissait faire, ils vous retireraient votre fête. Ma lettre va certainement provoquer des sourires, vous savez ces sourires "supérieurs" qui fleurissent sur certaines lèvres à l'évocation des mots "bonheur" "amour" ou "fidélité" : mots parait-il, démodés. Alors, que diront-ils ces blasés et ces incroyants en voyant que je m'adresse à celui qui porte, dans sa hotte, tous les mots qu'ils rejettent, celui dont le métier est de les distribuer. Si faisant fi de mes hésitations, je prends la plume aujourd'hui, c'est que la situation est grave. Il y a urgence, et depuis quelque temps, il me semble que vous nous négligez. À y bien réfléchir, il y a de notre faute : on vous a gâché votre fête. Elle est devenue trop souvent uniquement celle des paquets et de la gourmandise. On a oublié que vous apportiez bien davantage que des cadeaux et du foie gras : par exemple, la réunion de ceux qui s'aiment, le plaisir d'échanger, la communication, une part de merveilleux.

Oui, autrefois, avec quelle impatience tout le monde vous attendait ! Comme chacun, du plus jeune au plus âgé, se préparait à votre venue ! On décorait la maison, rien n'était assez beau pour vous accueillir. Vous étiez la lumière de l'hiver, la petite flamme au cœur du froid où l'on venait se chauffer l'âme, et on disait : "vivement décembre" ! Ce n'était pas seulement vos cadeaux que l'on attendait. Pour les plus petits, vous étiez le père caché et idéal qui voit l'intention plutôt que l'acte, l'effort plus que le résultat : celui qu'on ne pouvait tromper et qui savait, en toute équité, trier le bon du mauvais pour ne retenir finalement que le bon. Le soir, dans notre lit, nous sentions quelque part votre regard ; certes, vous nous faisiez un peu peur, mais nous vous devinions indulgent, et je crois pouvoir dire que nous vous aimions. Pour les parents, vous étiez tout le poids des souvenirs, la chaleur de cette part d'enfance que chacun garde en soi ; ils aimaient accomplir la besogne que vous leur confiiez et, grâce à l'espoir que leurs enfants mettaient en vous, ils pratiquaient la générosité et goûtaient à la joie de donner. La tradition voulait que cette fête fût familiale, ce qui n'empêchait pas d'y recevoir les esseulés... (la suite lundi)


3 commentaires:

  1. Très beau texte. Mais aujourd'hui les vacances de Noel s'appellent "vacances d'hiver". Exit Noel, et donc aussi le Père Noel. Exit la foi chrétienne, d'abord, puis aussi -plus grave- l'esprit qui l'animait et l'accompagnait.Or la nature a horreur du vide, c'est bien connu...

    RépondreSupprimer
  2. Feu mon père me disait: "jadis, au village, il n'y avait pas d'argent mais on s'aimait; aujourd'hui il y a de l'argent mais on ne s'aime plus." Autres temps, autres mœurs! Pas une raison pour rejeter le progrès matériel, bien sûr, mais cela suffira-t-il (à condition qu'il dure!) à "faire société"?

    RépondreSupprimer
  3. Il faudrait savoir ce que pensent les jeunes générations de leur vie en société? Sont-ils heureux comme ça?

    RépondreSupprimer