jeudi 29 avril 2021

Autour du livre de JDM... [ch. 6 : Camille CLAUDEL]

18ème extrait 

Camille Claudel
à Montdevergues
Pourtant les amis, les admirateurs, des citoyens se mobiliseront, une longue campagne de presse se déchaînera, en vain. Camille dérange, il faut la rendre invisible, la mettre hors d’état de nuire. Alors une censure terrible l’empêchera de recevoir et d’envoyer du courrier, a fortiori d’avoir des visites. Très vite, rien ne pourra rompre cet isolement inhumain. Seul Paul Claudel viendra la voir à l’asile, douze fois en trente ans. Comble de malheur : C’est la fin de la deuxième guerre mondiale, et la France entière souffre de la faim ; l’alimentation des hôpitaux psychiatriques est presque inexistante : "Mes pauvres fous meurent littéralement de faim : 800 sur 2000", préviendra le médecin dans une lettre à la famille…

Peut-on essayer d’analyser comment la démence s’est abattue sur Camille Claudel, sans vouloir à tout prix trouver un coupable de ce désastre ? Faute de renseignements sur ses antécédents génétiques, on peut, à la lumière de notions élémentaires de psychanalyse, avancer que, sa mère l’ayant rejetée dès la naissance, une fille ne pouvant remplacer le petit garçon que malheureusement Louise Athanaïse vient de perdre, et dont elle n’a pu faire le deuil, une carence initiale s’installe chez Camille. Quand l’enfant grandit, il semble que les échanges verbaux (exceptés des reproches souvent violents), et les échanges gestuels maternels n’aient pas existé envers cette enfant jugée sale et occupée à des jeux ineptes avec sa glaise qui envahit la maison. Par ailleurs, le plaisir de modeler, de sculpter, de créer des personnages est sans doute pour Camille source d’une immense satisfaction, et elle apporte toute son énergie dans ce contact physique, sensuel, avec la matière. À quel moment ce goût puissant pour la sculpture devient-il une impérieuse passion ? En tous cas, quand la rencontre avec Rodin a lieu, le miracle semble possible : Le grand manque affectif, les cruelles blessures, tout cela va peut-être s’effacer ? Elle va vite se sentir comblée par cet être qui lui parait être un reflet d’elle-même dans la passion qu’ils partagent ! Et ce sont bien quelques mois merveilleux qu’elle va vivre avec ce Maître qui va l’idolâtrer. Leur brève symbiose est totale. Plus dure est la chute quand les choses se gâtent, et là aussi il n’y a pas à chercher les responsabilités. Quand Camille s’éloigne, il semble qu’elle veuille se reconstruire, trouver son identité, et même aller, dans son art, sur d’autres chemins. Mais hélas, le vide initial réapparaît, insupportable, et ce sera la débâcle. Sa méfiance envers autrui va l’amener à des craintes de vols, de plagiats, de pillages qui seront bientôt le socle de ses délires …

2 commentaires:

  1. Quelle triste destinée! Son frère n'a pas été non plus très présent. A notre époque , il y aurait dans doute eu des remèdes pour soigner cette démence ? Merci à JDM pour nous avoir si bien raconté la vie de cette artiste.

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  2. Quelle triste destinée! Son frère n'a pas été non plus très présent. A notre époque , il y aurait dans doute eu des remèdes pour soigner cette démence ? Merci à JDM pour nous avoir si bien raconté la vie de cette artiste.

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