vendredi 24 décembre 2021

US ET COUTUMES... (à l'initiative d'Yzus)

 

Le repas du réveillon et celui du jour de Noël se composent traditionnellement de "sangui natalecci" (boudin de Noël), de cabri  ou d'agneau à la broche, ou d'anguilles grillées. Ceux qui mangent du boudin, suite à la tuaison du cochon, se partagent aussi le fameux ventre, cette panse farcie qui fait le régal des connaisseurs. Pour dessert, la maîtresse de maison prépare "a strenna" le dessert réservé  aux festivités du jour.   

Dicton :
Da San Stefanu à Natale
Quanti u ´jallu sparghje l'ale.
(Entre Saint-Étienne et Noël
Les jours allongent de l'envergure d'un coq.)

C'est dans la nuit du 24 au 25 décembre que peuvent se transmettre les formules d'incantation (incantesimu) dont les signatori font usage pour lever les sorts et conjurer le mauvais œil. Révélées au profane en toute autre occasion, ces formules perdent toute efficacité, et entraînent parfois la mort, dit-on, de celui qui les a divulguées de la sorte. Selon les régions, cette initiation la nuit de Noël doit se faire dans certaines conditions précises ; il faut parfois qu'il y ait grand vent ou orage pour que la formule puisse être transmise. D'après un autre témoignage : "les jeunes gens ont l'habitude de courir de maison en maison de manière à faire sept veillées avant la messe de minuit afin d'être jugés dignes d'apprendre, de vieilles femmes, certains signes superstitieux qui leur permettent, le cas échéant, de rendre impuissantes et inoffensives les piqûres de scorpions et autres animaux nuisibles. Ces signes ne peuvent valablement se communiquer que la nuit de Noël et seulement à ceux qui font les sept veillées. (*)
Dans certaines régions du sud de l'Île, cette transmission  est possible pendant les sept derniers jours de l'année. Les bergers, quant à eux, font "l'incantu di l'acula" : la nuit de Noël, ils récitent cette "incantation de l'aigle" qui préserve alors le troupeau du rapace tout au long de l'année à venir.
Pour ce faire, ils prennent trois lourdes pierres qu'ils déposent à terre et, les yeux tournés vers le ciel, ils récitent leur incantation à l'intention de l'aigle. Cela fait, ils vont enterrer les trois pierres, puis retournent chez eux.
Il y a un grand nombre de légendes locales qui se rapportent aux cloches et au carillon de minuit, le soir de Noël. Ainsi, près d'Aiacciu (Ajaccio), on peut entendre sonner des cloches dans la mer, au large de la tour de la Parata ; ce sont les cloches du village de Zicavu (Zicavo) que des pirates emportèrent un jour après avoir massacré les Zicavecci. Mais le curé du lieu qui avait échappé à cette tuerie pria le Seigneur de lui conserver les cloches, et l'on put voir les galères des assaillants sombrer avec leur précieux butin au large de la pointe de la Parata. On peut également entendre sonner les cloches du hameau de Scanafaghjaccia (à 1,5 kilomètre de Rezza) qui fut l'objet de terribles représailles de la part des Génois. Pour sauver leurs cloches, deux hommes allèrent les cacher dans la pinède. Ils moururent sans avoir pu révéler le secret du lieu où ils les avaient enterrées, et depuis lors, chaque année, on peut entendre leur carillon sonner la nuit de Noël à minuit. ( ** )
(*) Mgr. Chabot. La Nuit de Noël dans tous les pays. Pithiviers, 1912 .
(**) D'Angelis Gaston et Don Giorgi. Guide de la Corse mystérieuse. Coll. Les Guides noirs. Paris 1980.
Noël (suite)
Filles et garçons profitent de la nuit de Noël pour tirer des présages en ce qui concerne leurs amours et le sort que l'avenir leur réserve. Autrefois ces pratiques divinatoires étaient très largement répandues et de nombreux observateurs les ont rapportées : " La veille de Noël, dans l'Île de Corse, on tire le sort our connaitre les jeunes gens qui s'aiment. Dans le foyer, sur la plaque chaude, sont placés un grain de blé (le garçon) et un grain  d'orge (la jeune fille). Si les deux grains sautent l'un vers l'autre, amour. Si le blé court vers l'orge qui s'enfuit, la jeune fille n'aime pas et vice versa. On répète pour le curé et la béguine, le vicaire et la sœur, et l'on rit (*)." Un autre procédé est employé avec les feuilles d'olivier : " Pour savoir si  une jeune fille ou un garçon se marieront dans le courant de l'année, on jette dans le feu des feuilles d'olivier, une, deux, trois, les unes après les autres ; si la feuille danse et se retourne, ils se marieront ; si elles brûlent, il n'y aura pas  de mariage. (**)
(*) Carnoy Henry ." La fête de Noël en Corse" La Tradition. Paris 1889.
(**) Filippi Julie "Légendes, croyances et superstitions de la Corse " Revue des traditions populaires, 1894.

(Almanach  de la mémoire et des coutumes. CORSE
Par Claire Tiévant et Lucie Desideri. Albin Michel, éditeur 1986)

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